samedi 5 février 2011

De battre, mon cœur s’est arrêté.

La nuit juste avant les forêts, avec Romain Duris.
Texte : Bernard-Marie Koltés. Mise en scène : Patrice Chéreau


J’avoue, j’adore Romain Duris. Il est un de mes acteurs français préférés avec Mathieu Amalric et Louis Garrel. J’ai vu tous ses films : du "Péril jeune" à "L'homme qui voulait vivre sa vie", son dernier film, en passant par "L'arnacoeur" (je lui pardonne d'avoir joué dans ce navet). Mon préféré reste « De battre mon cœur s’est arrêté » (même si je le trouve irrésistible dans les films de Cédric Klapisch). Un film magistral, superbe, d’une noirceur absolue. A mes yeux, il est LE film qui a marqué un tournant dans la carrière de l’acteur, le faisant passer du statut d’éternel adolescent à celui d’homme.

C’est la première fois qu’il joue au théâtre. Il fait ses premiers pas dans un monologue d’1h30 mis en scène par Patrice Chéreau qui l’avait dirigé en 2009 dans « Persécution » (film excellent par ailleurs).

Je suis allée voir "La nuit juste avant les forêts" hier soir au Théâtre de l’Atelier. Quelle excitation ce fût de découvrir l’acteur en chair et en os ! Et je n’ai pas été déçue, bien au contraire…

La pièce :
Il s’agit d’un soliloque, mettant en scène 2 personnages, l’un parlant (Romain Duris), l’autre muet et scéniquement invisible.

L'histoire :
Un étranger qui vient d'être tabassé, tente de retenir, par tous les mots qu’il peut trouver, un inconnu qu’il a abordé au coin d’une rue, un soir de profonde solitude. Il lui parle de son univers. Une banlieue où il pleut, où l’on est étranger, où l’on ne travaille plus. Il lui parle de tout et de l’amour comme on ne peut jamais en parler, sauf à un inconnu. Il se raccroche à lui pour éviter de mourir à petit feu. (extrait du synopsis – www. theatredelatelier.com)

"La Nuit juste avant les forêts" m’a beaucoup touchée. Soliloque intense et violent sur la solitude extrême d’un personnage, chaque mot, impossible à contenir, met en lumière l’urgence de vivre et la peur d’être seul.

La prestation de Romain Duris est magistrale. Il incarne, avec beaucoup de justesse, ce rôle d’homme fiévreux, fier, arrogant, brisé. Ce personnage dont on ne sait rien, sauf qu’il est étranger et en marge de la société (il n’a pas de travail, ni de maison et vit à l’hôtel). J’ai retrouvé la verve de l’acteur de cinéma, sa présence, son charisme.

Le texte de Koltès est par ailleurs magnifique. Et le thème, celui de la solitude et de l'exclusion, bouleversant, en résonnance avec notre société actuelle. Le décor de chambre d’hôpital dramatise encore davantage la force du texte en plaçant cet homme face à sa mort. Dépouillé, il accentue le sentiment de solitude.

Je salue également la mise en scène de Patrice Chéreau, dont le talent réside dans la capacité à mettre en scène, avec beaucoup de justesse, la psychologie complexe des hommes.

Enfin, j’ai été beaucoup émue par les remerciements de Romain Duris à la fin de la pièce. Il paraissait timide, murmurant des « merci », sincère, et lui aussi certainement, profondément ému.

Courez-y, la pièce est à l’affiche jusqu’au 5 mars au Théâtre de l’Atelier. Environ 30 euros la place.

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